Le savoir-faire artisanal

LE REIFENDREHEN

L’art du tournage de Seiffen
« Au pays des petits animaux sculptés »

La ville thermale de Seiffen en Allemagne, également connue sous le nom de « village de jouets » est l’épicentre de l’art populaire dans les monts métallifères. Le Reinfendrehen est un type unique de fabrication de jouets utilisant des techniques de tournage sur bois. Cette technique a été développée vers 1800 à proximité de la ville de Seiffen en Allemagne. Le Reifendrehen exige beaucoup de minutie et d’expérience.

Elle a permis, au cours du 19eme siècle, la production de masse de figurines en bois, car elle était plus rapide et moins chère que la sculpture sur bois à la main. Aujourd’hui, une partie de l’exposition au musée du jouet de Seiffen est consacrée à l’artisanat des tourneurs – les Reifendreher- qui fabriquent ces jouets. 

Le processus produit entre autres, de petits animaux (reifentiere) qui font partie intégrante de l’art populaire de la région . En effet , le reifendrehen est connu pour sa production d’incroyables arches de Noé composées d’une multitude de petits couples d’animaux sculptés et peints. 

En voici deux exemples datant de 1880 provenant de la région. 

Aujourd’hui il existe encore quelques ateliers mais seul l’atelier de Christian Werner travaille encore de façon traditionnelle.

Voici son site internet:

https://www.reifendrehwerk.com


Dans l’atelier de Christian Werner

Le processus

Un morceau de bois circulaire d’environ 40 centimètres d’épaisseur, fabriqué à partir du tronc d’épicéa est fixé sur le support du tour à bois. Pour cette technique le bois doit avoir un grain fin et dense. 

Pour qu’il soit ainsi, l’arbre doit pousser dans des conditions difficiles, en hauteur, où il ne reçoit pas de soleil et se bat pour sa survie. 

Alpes de Kitzbülhel – Autriche

On ne trouve plus d’arbres comme ceux-là dans les monts métallifères. Le changement climatique les a fait croitre beaucoup trop rapidement dans la région. C’est pourquoi Christian Werner se rend chaque hiver dans les Alpes de Kitzbühel, grimpe sur les pentes nord et cherche des arbres qui répondent à ses besoins pour produire ses petits animaux. 

La lune influence la façon dont l’eau se déplace, quand elle est pleine, les arbres sont pleins d’humidité, ce qui n’est pas bon pour la suite du processus. C’est pourquoi ces arbres sont abattus à la nouvelle lune, après quoi ils sont laissés sur place jusqu’au printemps. 

Sur l’établi, le morceau de bois est maintenant placé dans un mouvement de rotation rapide. Le tourneur découpe des rainures dans la surface à l’aide de différents ciseaux.

Après un certain temps, il sépare l’anneau extérieur du bloc et l’enlève. 

À l’aide d’un couteau de cuisine et d’un marteau, il divise l’anneau en segments, et maintenant la forme devient visible, un dromadaire apparait….

Soixante dromadaires pour être précis, c’est le nombre de dromadaires que vous pouvez découper dans un anneau. 

Les animaux sont ensuite sculptés et peints à la main. 

Chèvres sculptées avant peinture
Zèbres peints en cours de séchage 

(sources: https://30-grad-magazin.com/en/christian-werner/)

LE TEXTILE

Un voyage dans l'imaginaire qui traverse le temps

Contrairement au bois, à la pierre et même s’il procède des plantes et des bêtes, le tissu n’existerait pas sans l’homme. Ce médiateur d’humanité a donné au singe nu son vêtement, sa tente, sa voile, ses bannières et son intelligence des choses. Il arrache le bipède à la barbarie et l’ouvre par le motif au chatoiement des significations.  Le tissu est à la fois agent et moyen de lecture des civilisations.
En Amérique du Sud, en Afrique ou en Asie centrale, les étoffes mettent en valeur l’identité culturelle d’un peuple, elles sont l’expression tissée d’une tradition souvent orale. Le tissu porteur des codes par où s’atteste à travers les générations une identité collective et personnelle. 

Universel, le tissu l’est non seulement parce qu’il traverse toutes les époques et les cultures et qu’il se présente encore aujourd’hui comme un enjeu économique. A l’instar de grands vecteurs civilisationnels comme la route ou le papier, le textile est un opérateur de communication et de transmission entre les hommes. En effet le rôle central du textile dans l’histoire de la technologie, du commerce et plus largement de la civilisation humaine à longtemps et est toujours largement négligé.

Pourtant l’Homme a co-évolué avec le tissu. Depuis la naissance, enveloppés dans une couverture nous sommes entourés de textiles. Ils couvrent notre corps, ornent nos lits et tapissent nos fauteuils. Le textile nous accompagne, il est partout.  Il s’agit donc de restituer au tissu sa qualité de médium universel. Car le tissu s’élabore, il propage des signes, il supporte des métaphores. Mais surtout, il fait lien. Il transmet, il relie : le passé le présent, l’individu à son groupe, la matière au vivant, le féminin au masculin, du lange au linceul. 

Le langage semble lui aussi nous révéler la place éminente du textile dans nos vies, dans notre culture et notre quotidien :

On lave son linge en famille, on file un mauvais coton, on trame un discours, on ourdit un complot, on est dans de beaux draps, on fait la navette, on va de fil en aiguille, on donne du fil à retordre, on en découd, on déduit, on bat à pleine couture, on est suspendu à un fil, on suit le fil d’une conversation …

Entourés de textiles nous ignorons en grande partie leur existence ainsi que les connaissances et les efforts incarnés dans chaque morceau de tissus. Pourtant l’histoire du textile est profondément liée à l’histoire de l’ingéniosité humaine.  En effet, l’agriculture s’est développée à la recherche de fibres et de nourriture. La révolution industrielle et le développement de machines permettant un gain de temps de travail sont nées du besoin de fil. 

Autant que les épices et l’or, la quête des tissus et des teintures incite les marchands à traverser les continents et les marins à explorer. Depuis des temps les plus anciens à nos jours, en passant par la fameuse route de la soie, le commerce du textile a favorisé les échanges à longue distance. 

Les minoens exportaient jusqu’en Égypte, des draps de laine, dont certains étaient teints en pourpre précieux. . Les anciens romains portaient de la soie chinoise qui valait son pesant d’or. L’industrie textile a financé la renaissance italienne et l’empire moghol, nous offrant le David de Michel-Ange et le Taj Mahal. Elle a permis la diffusion de l’alphabet et la comptabilité en partie double, donné naissance aux institutions financière mais a malheureusement favorisé la traite négrière. C’est alors que d’une manière à la fois subtile et évidente, belle et terrible, le textile a façonné notre monde. 

(Ce petit texte a été rédigé en reprenant les écrits de Régis Debray et de Patrice Hugues « Dictionnaire culturel du tissu » ainsi que ceux de Virginia Postrel dans son livre « The fabric of civilization »

Véritable marqueur social, la représentation et la diversité incroyable des étoffes dans la peinture flamande dresse le panorama économique, politique et sociologique de l’époque. 

Jan van Eyck ( 1390- 1441) : le maitre de l’étoffe

Artiste fondamental du mouvement primitif flamand au XVe siècle, Jan Van Eyck sera considéré pendant la Renaissance comme l’un des plus grands maîtres européens. Il est notamment connu pour son réalisme méticuleux et son humanisme. Il s’intéressait à l’homme au cœur du monde. Van Eyck  accorde donc une attention toute particulière aux traitement des étoffes qu’il rend avec un réalisme saisissant.